Cannabis récréatif : la légalisation annoncée en Allemagne

Le cannabis est loin de rassembler des opinions unanimes. D’un continent à l’autre, les législations diffèrent et peuvent se révéler d’une rigidité absolue, menant à la peine de mort. En Europe, d’une frontière à une autre, les différences se maintiennent tout autant. Pourtant, le changement est en marche : des révolutions qu’attendent impatiemment les spécialistes du secteur. Alors que l’Allemagne annonce une libéralisation prochaine du cannabis, la France saura-t-elle se mettre à la page sur son retard ?

Le gouvernement allemand lance la légalisation du cannabis

Les dernières élections allemandes lancent une nouvelle ère pour le pays, qui fait ses adieux à la chancelière Angela Merkel. C’est une nouvelle coalition, réunissant trois partis, qui prend les rênes dans les prochaines semaines. Le SPD, Die Grünen et le FDP ont révélé leur contrat de coalition. Le document, de 177 pages, mentionne des idées politiques cherchant à ‘oser plus de progrès’, tel que le clame leur slogan. C’est sous cette volonté de progrès que se cache l’annonce choc du voisin germanique : la légalisation du cannabis.

Le gouvernement allemand en construction annonce ainsi clairement sa rupture avec la politique sécuritaire mise en place jusqu’alors. La coalition se positionne, surtout, comme un des seuls gouvernements au monde à donner le feu vert complet à la consommation récréative du cannabis. Jusqu’à présent, seuls le Canada et l’Uruguay autorisaient cet usage du cannabis. D’autres pays, tels que les États-Unis, sont toutefois en voie de modifier les lois. Certains États américains, par exemple, autorisent le cannabis récréatif quand d’autres réfléchissent encore l’assouplissement des contraintes.

L’Allemagne, par conséquent, serait pionnière sur le sol européen avec cette proposition de légalisation du cannabis. C’est, selon elle, une question de santé publique. La légalisation suggère un meilleur contrôle des conditions de vente, de l’état du marché, des habitudes de consommateurs. Le Canada, en quelques années après la légalisation du cannabis, avait bel et bien observé une main mise importante sur le marché noir du pays.

Comment le cannabis pourra-t-il se consommer ?

C’est une politique qu’applique aussi, depuis les années 70, les Pays-Bas. Ces derniers n’ont pas tout à fait légalisé le cannabis : son usage est toutefois strictement réglementé pour permettre sa consommation. Dans la majorité des cas, les pays appliquent une forme de limitations autour de la quantité de produit en sa possession ou autour de l’endroit d’achat. Ils cherchent ainsi à orienter la clientèle vers des boutiques officielles, réglementées, dans lesquelles la qualité du cannabis et de son circuit de production peut être vérifiée. Au sein de ces boutiques tenues par des experts, les amateurs peuvent se fournir en graines de cannabis comme en produits à fumer.

C’est un schéma identique qui devrait prendre place en Allemagne. Le projet de législation mentionne, en effet, des boutiques agréées. Ces dernières permettront de distribuer le cannabis à consommer, que ce soit pour usage récréatif ou thérapeutique. Tout adulte sera ainsi en droit de s’y rendre, sans risques légaux. À Berlin, par exemple, la possession de quelques grammes à usage personnel était déjà autorisée. Cette liberté de consommation tient avant tout d’une volonté d’améliorer la qualité des produits circulants sur le marché.

La coalition n’a pas encore déterminé si cette distribution légale du cannabis se fait au sein de tabacs, coffee-shops, pharmacies ou autres boutiques. Les produits, toutefois, seront bien en vente libre pour les personnes majeures. Elles y bénéficieront de cannabis qui, au contraire de celui vendu dans la rue, n’est pas coupé. La législation, elle, encadrerait les constituants du cannabis disponible de sorte à proscrire la laque ou le sable utilisés pour couper. Les risques liés à du cannabis de synthèse, au taux de THC dangereux, seraient pareillement limités.

Le Luxembourg autorise la culture de cannabis récréatif

Si l’Allemagne détonne dans le paysage politique avec cette annonce progressiste, elle suit de près un changement tout aussi important chez un voisin. Le Luxembourg, en effet, pousse la dépénalisation du cannabis plus loin encore. Le pays, jusqu’alors, était dans une logique de prohibition de la consommation. Elle a réfléchi, finalement, un projet pilote de dépénalisation. Les choses ont été plus rapides encore, avec une autorisation et une légalisation du cannabis.

Ces autorisations données par le Luxembourg, au contraire d’autres pays européens, permettront de cultiver directement ses plants de cannabis. Les adultes majeurs auront ainsi le droit de posséder quatre plants. Ces derniers peuvent être issus de graines commandées depuis tout commerce, en ligne ou non, qui soit locaux ou d’ailleurs. Ce sera l’occasion pour les habitants d’expérimenter avec différents types de graines de cannabis, qui proposent différents niveaux de THC. La législation ne limitera pas le taux de THC présent dans les produits accessibles à la vente.

La France espère-t-elle sa révolution sur le cannabis ?

Là encore, les voisins de la France se révèlent largement en avance sur la question de la légalisation. Si certains candidats à la présidentielle 2022 cherchent à mentionner le cannabis et sa légalisation dans leur programme, le sujet reste tabou et très controversé. En effet, le pays s’est tardivement intéressé à une réglementation de tout cannabinoïdes. Même le cannabis thérapeutique, déjà largement exploité et utilisé dans certains pays, tels que les USA, n’a connu que ses premiers pas en France au cours de l’année 2021. Les premiers essais de cannabis médical lancés ont pour objectif d’ouvrir une filière du cannabis en France.

C’est une porte ouverte qui intéresse particulièrement le secteur, qui y voit de nombreux avantages. Le pays, après tout, est le premier producteur de chanvre. Il dédie toutefois cette culture uniquement à un usage textile, alors que cela pourrait lui permettre de concurrencer le reste du marché européen. La question semble d’autant plus essentielle, notamment aux yeux de certains spécialistes. Un rapport de l’Assemblée nationale souligne, par exemple, que les Français représentent les premiers consommateurs européens de cannabis.

La transition de ce marché vers des opportunités légalisées et réglementées pourrait ainsi répondre à une question de santé publique. C’est, du moins, de cette manière que l’Allemagne se lance dans ce projet de légalisation. Le premier bilan de leur législation, prêt à être réalisé d’ici à quatre ans, donnera peut-être de nouvelles intentions au gouvernement français. La question, alors, devrait une fois encore faire sa place au sein des programmes politiques. Les prochaines élections françaises marqueront-elles, ainsi, la révolution attendue par les acteurs du cannabis ?

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